Un complot ourdi contre les Médicis
Mise en contexte
A
u XVe siècle, la cité-État de Florence est une oligarchie. Le pouvoir est entre les mains de quelques familles qui se partagent des zones d’influence dans la ville.
La cité est constituée de quatre quartiers: Santo Spirito, Santa Croce, Santa Maria Novella et San Giovanni.
Tout semble se gérer par parrainage.
Les petits services rendus engendrent autant de liens qui se tissent entre les membres des riches familles et leurs partisans.
Derrière l’organisation de façade de la Cité, mise en place par la République, se cache un réel pouvoir mafieux entre les mains de quelques riches familles de marchands.
Mécènes des arts, défenseurs des pauvres, protecteurs d’églises et de couvents, les Médicis s’attachent la fidélité des Florentins par leurs actions dans le domaine public. Grâce à une solidarité avec des citoyens de tous les quartiers, ils se créent un large réseau de partisans, qui, en temps de crise, se mobilisent pour prendre le parti de leurs bienfaiteurs.
Cette course au pouvoir que se livrent les riches familles florentines les entraînera parfois à verser le sang.
Laurent de Médicis peint par Girolamo Macchietti
Les Médicis et les Pazzi à couteaux tirés
L
orsque Laurent succède à son père, il écarte tous les membres de la famille rivale des Pazzi, des postes officiels de Florence. Cette mise à l’écart du pouvoir, va générer, dans le camp des Pazzi, une violente réplique.
Le projet des Pazzi est simple: se débarrasser une fois pour toutes de l’hégémonie des Médicis.
Les Pazzi ont de puissants alliés. Endettés auprès de la banque des Médicis, les hauts dignitaires de l’église se lient au complot.
Dimanche 26 avril 1478.
Jour de Pâques
En ce jour du 26 avril 1478, le tout Florence est rassemblé dans la cathédrale Santa Maria del Fiore pour célébrer la fête de la résurrection du Christ.
Au cours de la grand-messe, le signal de l’attaque est donné au moment où Julien de Médicis et son frère s’agenouillent pour recevoir l’hostie de la main du prêtre.
Francesco de Pazzi et ses complices se précipitent sur les Médicis. Julien de Médicis s’effondre. Il a reçu 19 coups de poignard.
Laurent, quant à lui, bien que blessé au cou, parvient à s’échapper.
Il se montre à la foule réunie. Les conjurés réalisent assez rapidement qu’ils ont perdu la partie. Les habitants de Florence ne leur apporteront pas leur soutien.
Après la stupeur, la colère s’empare des esprits. Les partisans des Médicis ne pensent qu’à venger leurs bienfaiteurs.
Plusieurs membres de la famille Pazzi qui ont trempé dans le complot sont capturés et exécutés.
Au cours des deux semaines qui suivent l’attentat, ce sont plus de 70 personnes qui succomberont aux représailles.
Les membres de la famille Pazzi qui ne furent pas « occis » furent bannis à vie.
La vengeance des Médicis poursuivit tous les coupables
Bernardo di Bandino Baroncelli, l’un des assassins, réussit à trouver refuge Constantinople.
Il y fut capturé et ramené enchaîné jusqu’à Florence où il fut pendu aux fenêtres du Palais du Bargello le 29 décembre 1479.
Ci-contre
Bernardo di Bandino Baroncelli pendu pour avoir participé à l’assassinat de Julien de Médicis.
Dessin à la plume et encre brune.
Léonard de Vinci
Cet épisode fut sans doute le plus sanglant dans le conflit qui opposa la famille des Médicis à celle des Pazzi. Son dénouement fut catastrophique pour le lignage des Pazzi. Leur projet, qui consistait à écarter définitivement les Médicis du pouvoir, se retourna contre eux. Si l’assassinat de Julien ébranla toute la Toscane, Laurent en sortit grandi. Il renforça son autorité sur la République de Florence en décrétant, que désormais, toute législation devait recevoir son approbation. Il disposait ainsi d’un pouvoir quasi absolu dans la cité-État.
Brillant diplomate, Laurent de Médicis parvint encore à déjouer une coalition menée par le pape Sixte IV qui soutenait la cause des Pazzi.
Évitant la guerre avec les ennemis de la République, Laurent fut acclamé par les Florentins au nom de « Il Magnifico ».
Diaporama
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Palais du Bargello à Florence
siège de la police de la ville et de son Gonfalonnier de justice (chef du gouvernement civil).
Les peintures infamantes
À Florence, les portraits de ceux qui étaient « recherchés » ou ceux qui avaient été condamnés par contumace étaient exposés sur la façade du Palais du Bargello.
Ces peintures infamantes étaient accompagnées de commentaires qui reprenaient, en des termes peu élogieux, les actions dont ils s’étaient rendus coupables (vols, dettes, faillites, fraudes, contrefaçons, trahisons, meurtres…).
Le portrait était censé refléter la bassesse de l’individu, c’est pourquoi le sujet pouvait être entouré d’animaux impurs tels que porcs et serpents. La honte constituait déjà en soi une punition sociale importante.
La trahison envers la cité-État était l’un des crimes les plus graves.
Les traîtres étaient représentés pendus par un pied, la tête vers le bas. Cette posture du pendu se retrouve d’ailleurs dans le jeu de Tarot.
Les dirigeants de la ville commandaient ces peintures infamantes à de grands artistes parce qu’ils voulaient des portraits de bonne facture, aisément identifiables.
Même s’il était impensable de refuser de telles commandes, les artistes qui exécutaient ce genre de travail étaient dans la crainte de subir des représailles. Les aléas de la vie politique florentine avec son cortège d’intrigues pouvaient créer des renversements de situation et précipiter l’artiste dans une disgrâce non méritée.
Des peintres célèbres, comme Sandro Botticelli et Andréa Del Sarto ont dû se livrer à ce genre d’exercice.
Aucune « peinture infamante » réalisée sur les murs du Bargello n’a survécu au temps. Ces œuvres n’avaient aucune raison de subsister après la capture et le jugement des coupables. Seuls quelques dessins préparatoires ont été retrouvés.
Ci-contre
Étude de pendu par un pied d’Andréa Del Sarto
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